If you know how to do it (improvise or teach) it means that you’ve codified your bag of tricks !

Si vous savez le faire (improviser ou enseigner), ça veut dire que vous avez codifié votre boite à outil !

Keith Johnstone
Source : Improv Notebook

Cette citation est cruciale, car elle met le doigt sur quelque chose de très profond, la nature même de l’improvisation. L’improvisation, par définition, c’est faire sans totalement “savoir faire” : il y a dans l’improvisation une notion d’absence de préparation, d’absence de contrôle, d’absence de compétence parfaite. Si l’on “sait faire”, alors on maitrise les paramètres, les processus et le résultat, et ainsi, par définition, on n’improvise plus !

Il faut voir tous ces improvisateurs qui n’échouent plus sur scène ! Au fil des ans, ils ont développé une boite à outil de techniques, de personnages, d’astuces, de réflexes, etc… qui ont un effet “garanti” sur le public si bien qu’ils ne prennent plus de risque sur scène. Au final, ils sont reconnus comme “bons improvisateurs” par le public et leurs pairs, mais en réalité n’improvisent plus.

Par extension, comme le souligne Keith Johnstone, cela s’applique à l’enseignement : Keith dit que l’enseignement de l’improvisation doit être improvisé. En effet, comment enseigner l’improvisation – qui par nature doit échouer – si on l’enseigne dans le cadre rigide d’un “programme” et de “niveaux” (débutants, avancés, confirmés), cadre qui a un impératif d’efficacité, ne serait-ce que pour l’élève qui paie un service et exige un retour sur investissement ? A l’issue d’un atelier d’improvisation théâtrale, la seule vraie mesure de progression, ce n’est pas le fait d’avoir “réussi” (c’est à dire : faire de bonnes scènes), mais d’avoir “échoué”, d’avoir appris à gérer ces échecs, ce qui est particulièrement difficile sur scène et devant un public, d’en avoir retiré le feedback adapté et idéalement de vouloir continuer à échouer.

You can’t win every class as a teacher and you can’t win every audience as a performer.

Vous ne pouvez pas réussir chaque atelier en tant qu’enseignant et vous ne pouvez pas ‘gagner’ chaque public en tant que comédien.

Keith Johnstone
Source : Improv Notebook 

Pour en revenir aux “bons improvisateurs”, savoir improviser, en définitive, c’est savoir échouer et gérer l’échec. Si les improvisateurs confirmés que vous voyez sur scène n’échouent plus, c’est probablement qu’ils n’improvisent pas, mais qu’ils vous resservent des techniques, des personnages ou des situations pré-chauffées qu’ils maquillent des attributs de l’improvisation comme le fait de demander des suggestions au public ou de souligner l’interactivité.

Désormais, pour vos spectacles et vos ateliers d’improvisation théâtrale,
soyez réalistes, exigez l’impossible : exigez l’échec !

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Quelques moyens simples de continuer à échouer en tant qu’improvisateur ou en tant que troupe :

Avant un spectacle

  • Réunissez vous et dites vous mutuellement que chacun, chaque acteur, mais aussi le présentateur, la régie, etc… DOIT SE PLANTER au moins deux fois dans le spectacle. Promettez le à haute voix.

  • Identifiez ce qui vous fais PEUR sur scène : le contact physique ? le silence ? les thèmes politiques, sexuels ? le fait de révéler un secret personnel ? Prévoyez un moment pour le faire pendant le spectacle. Demandez à un partenaire de vous mettre dans cette situation. Prévoyez un mécanisme de sauvegarde pour mettre fin à la scène si vous êtes mal à l’aise.

Pendant un spectacle

  • Si votre spectacle le permet, ANNONCEZ AU PUBLIC que vous allez tenter quelque chose dont vous n’avez pas l’habitude. Par exemple : “Pour la prochaine scène, nous allons faire une scène où nous essaierons de représenter le plus fidèlement possible une famille normale, en utilisant nos propres souvenirs personnels. A chaque fois que nous tentons cette scène, nous échouons car la famille devient toujours loufoque, donc merci de votre soutien.”

  • Si vous sentez que vous anticipez, que vous contrôlez la scène ou que vous cherchez à “placer” une technique, COURT-CIRCUITEZ votre cerveau. Par exemple :

    • Modifiez votre corps ;

    • Brouillez votre pensée verbale en vous imposant vous même un mantra (une phrase simple que vous répétez dans votre tête) ou en vous imposant de résoudre le calcul mental “37 x 45 = ?” avant la fin de la scène ;

    • Introduisez un tilt universel.

Après un spectacle

  • Pour le débriefing, reprenez la liste des scènes que vous avez faites et déterminez si c’est un échec ou une réussite. A chaque échec, REMERCIEZ (”Merci d’avoir dit ça.”) la personne qui a souligné l’échec et celle qui a fait l’erreur. Vraiment. Si vous n’avez pas peur de passer pour une secte, répétez ensemble : “On est nuls et on adore ça !”

  • Identifier les MOTIFS qui reviennent souvent : vos scènes sont elles à majorité (plus de 75%) verbales ? comiques ? composées de contraintes ? libres ? courtes ? longues ? Orientez le prochain spectacle dans la direction opposée.

Source: improviser.fr L’échec est au coeur de l’improvisation

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